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Hippisme : bienvenue à « Grosbois- sur-Mayenne » !

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C’est une oasis équestre, située aux portes de Paris, à l’orée du bois de Vincennes et son célèbre hippodrome. C’est aussi un petit coin de Mayenne. Le centre d’entraînement de chevaux trotteurs du domaine de Grosbois accueille environ 80 éleveurs, entraîneurs et drivers. Tous sont réunis pour le Meeting d’hiver de Paris-Vincennes, la haute saison des courses de trot. Une forte délégation de Mayennais y est présente, véritables ambassadeurs d’une discipline intégrée à l’ADN Mayenne. 

Un ciel bleu, froid, s’est figé sur les pistes de sable rose du domaine. Quelques trotteurs alternent les sprints et les relâches, corde à gauche. Ces athlètes à quatre pattes sont des esthètes. L’effort sublime leur musculature ruisselante et vaporeuse en ce matin frisquet. Ils incarnent la puissance et l’élégance. Ils sont la touche finale à ce décor de carte postale. 

Nous sommes à Grosbois, situé à cheval sur les communes de Boissy-Saint-Léger et Marolles-en-Brie (Val-de-Marne), au sud-est de la capitale. Ce domaine privé de 440 hectares, acquis en 1962 par la Société d’encouragement à l’élevage du cheval français (appelée communément Le Trot et société-mère des courses de trot en France), est un centre d’entraînement unique au monde par les prestations qu’il offre. À quelques encâblures du cœur de Paris s’est organisée une vie dévouée au cheval de trot. Les grilles franchies, tout juste extirpés du tumulte de la circulation francilienne, l’automobiliste et ses chevaux-vapeur s’effacent devant les chevaux de sang. Des sillons de terre s’entremêlent et parcourent le domaine : « Il faut prendre garde, les chevaux sont prioritaires et arrivent de toutes parts », précise Christophe Walazyc, régisseur du domaine.  

Meeting d’hiver

Si la nature s’éveille au printemps, c’est en automne que revit Grosbois, avec l’ouverture du Meeting d’hiver ou la saison des courses à l’hippodrome de Paris-Vincennes. À la Toussaint, une transhumance s’opère des provinces vers l’Île-de-France. Naturellement, l’Ouest et la Mayenne sont idéalement représentés. Une dizaine de professionnels du département y posent leurs sulkys de novembre à mars. Parmi eux, Christian Bigeon du haras d’Haufor à Saint-Ouën-des-Toits, un fidèle : « Mon père fut l’un des tout-premiers à s’installer à Grosbois au milieu des années 60. J’ai pris le relais et sincèrement je ne crois pas avoir déjà vécu un hiver en Mayenne ! » 

Christian Bigeon et sa femme louent une installation complète comprenant leur maison d’habitation, 30 boxes pour autant de chevaux, un appartement pour le premier garçon d’écurie et cinq chambres pour les cinq lads. L’ensemble forme une cour carrée au milieu de laquelle trône un carrousel automatique pour la marche des chevaux : « La construction des bâtiments a été réfléchie et conçue intelligemment et offre des conditions de vie et de travail excellentes. Ici, nous sommes concentrés sur la compétition et les performances, l’essence même de notre métier quand on est à Grosbois », relate Christian Bigeon. 

« Grosbois, c’est Clairefontaine »

À l’autre bout du domaine, Charles Dreux, sa compagne Claire et leur fils âgé de deux ans logent dans une maison plus modeste, mais tout confort. Contiguës à l’habitation principale, des chambres pour le salarié et l’apprenti ainsi que treize boxes implantés en U dessinent une cour ouverte. En face, leur voisin, le Sarthois Laurent Koubiche, bénéficie d’installations identiques. L’effet miroir confère au lieu des allures de cottage de vacances. Des allures seulement. Car chaque jour, Charles Dreux et son équipe se lèvent aux aurores, nourrissent les chevaux, nettoient et paillent les boxes puis enchaînent avec l’entraînement des chevaux, avant éventuellement de filer à Vincennes en cas d’engagements. Le temps est minuté. Sur ses douze trotteurs présents à Grosbois, quatre « 2 ans » sont présents pour parfaire l’apprentissage du haut niveau et participer aux qualifications. « Malheureusement, ma meilleure jument, Étoile de Bruyère, n’est pas à Grosbois. Elle est sujette à des myosites (muscles qui se tétanisent) causées par le stress. Elle préfère être au pré, en Mayenne », se désole l’entraîneur qui doit donc gérer des allers-retours supplémentaires avec Saint-Berthevin. 

Cette contrariété évacuée, Charles Dreux partage l’avis de Christian Bigeon quant à la qualité des installations et services rendus sur le domaine : « Grosbois, c’est comme Clairefontaine pour les footballeurs, le top ! Nous sommes soulagés de quelques tâches quotidiennes avec la livraison des aliments et de la paille, le ramassage du fumier. » « Les pistes sont toujours irréprochables et préparées en cas d’intempéries. Les allées cavalières, quotidiennement entretenues, ont des déclinaisons et des natures de sols différentes », précise Christophe Walazyc. « On peut ainsi effectuer un travail spécifique pour chaque cheval et se fixer des objectifs de progression à moyen terme », ajoute Christian Bigeon, chronomètre GPS en main, enchaînant les tours de piste matinaux. Les mois passés à Grosbois valident et conditionnent une grande partie de la saison. La fin d’un meeting annonçant déjà le début du suivant, « Grosbois et Vincennes ne quittent jamais notre esprit », assure Charles Dreux. 

« L’ Amérique » a 100 ans !

La compagne de Charles Dreux travaille au sein d’un cabinet d’assu-rance situé à Laval. Depuis Grosbois, grâce au télétravail, elle assure ses missions durant les quatre mois du Meeting d’hiver. Pour garder leur enfant, une maison d’assistantes maternelles, « Les Petits Trotteurs », a récemment vu le jour au cœur de Grosbois : « On mesure notre chance, surtout en région parisienne », indique le Mayennais. Car partir à Grosbois, c’est embarquer toute la famille : « Nous sommes un peu nomades ! », glisse Christian Bigeon qui rappelle que lorsque ses enfants fréquentaient l’école primaire, ils étaient scolarisés en région parisienne de la Toussaint à février. 

Avec son millier d’habitants durant l’hiver, Grosbois s’apparente à une ville dans la ville. Une vie de quartier résidentiel s’organise : « On se salue, se félicite en cas de victoire. Si la concurrence est réelle sur les pistes, elle n’empêche pas l’entraide et les amitiés », assure Charles Dreux, même si les occasions de profiter du bon temps sont rares. Vingt minutes suffisent pour rejoindre l’hippodrome de Paris-Vincennes depuis Grosbois. Liés comme les doigts d’une main, Vincennes est une extension naturelle de Grosbois ou peut-être le contraire. Du sable rose au mâchefer cendré, la passion demeure intacte. 
Si Grosbois est le cocon, Vincennes est l’arène. Une enceinte qui, le dimanche 26 janvier 2020, vivra une ferveur qu’aucun entraîneur ne voudrait manquer. Mais ils ne seront que dix-huit partants et autant de cracks à espérer décrocher la gloire et les étoiles du Grand Prix d’Amérique, dont on célébrera les 100 ans. Et si la Mayenne s’invitait à la fête ?

Type éditorial